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SHNA: combler le vide juridique

Pour un public particulièrement fragilisé, trouver une solution d’hébergement relève parfois de la chasse au trésor. Reste alors les SHNA.

Le phénomène des maisons «pirates» ne touche pas que le secteur du handicap. À Bruxelles et en Wallonie, des structures d’hébergement non agréées (SHNA) accueillent un public qui cumule les problématiques: sans-abrisme, santé mentale, polytoxicomanie, passé carcéral, etc. À Bruxelles, la ministre de l’Action sociale vient d’annoncer une réglementation pour 2017.

Bruxelles compterait une petite dizaine de structures d’hébergement non agréées (SHNA) connues sur son territoire. Dont deux, avec Sweety-home, accueillent, à notre connaissance, un public exclusivement handicapé. Selon un recensement réalisé par la Strada en 2014, cela représente une offre de 312 lits. Ces maisons dites parfois «pirates» prennent en charge des personnes qui n’ont pas trouvé de place ailleurs: pas assez malades pour l’hôpital psychiatrique, mais trop désocialisées pour s’intégrer dans une maison d’accueil pour sans-abri, trop jeunes pour être déjà «casées» en maison de repos… Sur la ville de Liège, quatre maisons sont connues (elles encadrées par une réglementation communale mise en place par l’ancien échevin des affaires sociales Benoît Dreze, mais récemment abrogée son successeur par André Schroyen). Au total, 182 personnes y sont hébergées, d’après des chiffres du CPAS. À quoi s’ajoutent trois SHNA à Trooz, Herstal et Vottem, dont nous ne connaissons pas la capacité d’accueil. À Charleroi, nous avons identifié deux structures problématiques, actuellement en pourparler avec l’Aviq pour tenter une forme de régularisation. Deux autres structures, Gema et le Home Massimo ont récemment fermé leurs portes.

Si toutes les maisons non agréées ne sont pas à loger à la même enseigne, des dysfonctionnements graves et récurrents ont été dénoncés, notamment par le secteur associatif (lire notre enquête: «Foyers pirates: un business en eau trouble», Alter Échos n°416 du 20 janvier 2016): confiscation des papiers, couvre-feux, administration médicamenteuse peu contrôlée, exploitation du personnel, insalubrité, manque de transparence dans la gestion de l’argent des habitants… Pour rentabiliser leurs investissements en l’absence de subsides, ces structures à vocation lucrative travaillent avec un personnel réduit à son strict minimum pour encadrer un public souvent violent. Ajoutez-y flou juridique et absence de contrôle, et vous obtenez un cocktail potentiellement explosif!

Brouillard législatif

Pour obtenir des subsides, les structures qui prennent en charge des personnes sans-abri,

Côté wallon, la situation juridique est complexe. En fonction du public accueilli, les réglementations divergent. Dans le secteur du handicap, une structure qui prend en charge à titre lucratif plus de deux personnes handicapées doit faire l’objet d’une autorisation délivrée par l’Aviq, selon l’art. 29 du décret du 6 avril 1995. La violation de cette législation est passible de sanctions financières, voire d’une peine d’emprisonnement. Des contrôles régulier sont effectué.  Dans le secteur de la santé mentale, en revanche, l’Aviq ne contrôle que les maisons de soins et les habitats protégés agréés par les hôpitaux psychiatriques.

Faut-il leur conférer une forme de reconnaissance minimale? Faute de moyens pour ouvrir de nouvelles places dans le circuit «officiel», fermer ces lieux reste délicat. Et, les travailleurs sociaux le soulignent aussi, certains résidents peuvent y trouver une forme de stabilité. La réglementation y est plus souple, la durée de séjour n’est pas limitée, il n’y a pas d’injonction à devenir autonome à tout prix.

À Liège, l’ex-échevin des Affaires sociales Benoit Drèze avait adopté un règlement communal en 2012 pour tenter de «normaliser» la situation. Le texte qui prévoyait un minimum d’encadrement et de formation du personnel a été récemment abrogé par son successeur qui ne l’estimait pas praticable sur le terrain. À Bruxelles, l’initiative est venue du secteur sans-abri. En 2010, un groupe de travail composé de travailleurs sociaux s’est constitué, sous la houlette de la Strada. Leurs travaux ont conduit à la rédaction d’un projet de convention sans subventionnement, avec encadrement par l’inspection de la Cocom. Le projet avait été enterré avec le changement de législature. Jusqu’à présent, la ministre de l’Action sociale, Céline Fremault, s’y opposait. Mais les dernières nouvelles communiquées par son cabinet annoncent un changement de politique: «La situation de vide juridique demeure problématique. Cette situation est néanmoins appelée à évoluer via l’écriture et l’adoption en 2017 d’une nouvelle ordonnance Cocom en matière de sans-abrisme. Dans le chapitre ‘centres d’accueil d’urgence’ ou encore dans celui consacré aux ‘maisons d’accueil’, seront tracées clairement les frontières déterminant les possibilités d’agrément de ces lieux d’hébergement. Dans ce contexte légal, seront également définies les procédures à suivre en cas d’activité illicite. On pourra ainsi mieux définir les sanctions envisageables lorsqu’on rencontrera des abus chez des marchands de sommeil ou encore lorsqu’on est confronté à des cas d’exploitation.»

 

  • N°431 – AlterEchos
  • 11 octobre 2016
  • Par Sandrine Warsztacki

 

L’ASBL AMA

Créée en mai 1968, la Fédération des maisons d’accueil et des services d’aide aux sans-abri (AMA) fédère des institutions assurant l’accueil, l’hébergement et l’accompagnement d’adultes et de familles en difficultés psychosociales mais aussi des personnes morales ou physiques actives dans le domaine de l’aide et de l’accueil de personnes en grande précarité sociale.

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