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Sans-abrisme : une vision bruxelloise à trop court terme
Une étude de Brussels Studies a analysé la situation sur ces dix dernières années. Le constat est sans appel.
En région bruxelloise, le nombre de sans-abri et de personnes mal logées a plus que doublé en dix ans (+142,2 %), ressort-il d’une étude menée par la revue Brussels Studies sur base des comptages effectués chaque année par l’ASBL Strada, des chiffres délivrés par les structures d’accueil spécialisées, qu’elles soient agréées ou non.
Selon les auteurs de l’étude, Benoît Quittelier et Nicolas Horvat, « cette augmentation est d’autant plus inquiétante qu’elle est très probablement sous-estimée, plusieurs catégories de personnes n’étant encore que très partiellement couvertes par le dénombrement » . Dans leur analyse, les deux auteurs assurent que les pouvoirs publics bruxellois « semblent avoir privilégié la simple mise à l’abri » des personnes précarisées « au détriment d’une approche plus structurelle basée entre autres sur le renforcement des dispositifs d’accompagnement et de suivi » . […] « Cette vue à court terme transparaît également à travers ce que les professionnels du secteur ont pris coutume d’appeler la gestion au thermomètre : à l’augmentation momentanée des capacités d’hébergement durant la période hivernale succède l’insuffisance des moyens avec lesquels les services doivent composer pour assurer l’accueil le restant de l’année. »
L’étude pointe également l’effet pervers de la Plateforme citoyenne, collectif de Bruxellois logeant bénévolement des sans-abri. « Au-delà de son intention première, ce type d’initiative risque d’invisibiliser le manquement des pouvoirs publics qui, parallèlement, se désinvestissent déjà progressivement de leurs missions en se reposant sur la multiplication des initiatives privées. » De fait, un quart des personnes sans abri trouvent une solution d’hébergement en marge de tout dispositif conventionné telles les communautés religieuses, les squats ou les occupations négociées.
La situation risque d’ailleurs de ne pas évoluer favorablement, estiment encore les auteurs de l’étude. « De l’avis de nombreux observateurs, les mesures palliatives adoptées pour endiguer le phénomène ne sont pas à la hauteur du défi à relever : l’augmentation du nombre de personnes sans-abri et mal logées […] ne pourra être enrayée qu’à la condition de s’attaquer aux mécanismes conduisant à l’exclusion. »
Force est de constater que ce phénomène d’exclusion impacte de plus en plus de Bruxellois. Entre 2007 et 2017, le nombre de bénéficiaires du revenu d’intégration sociale a ainsi grimpé de 73,4 % tandis que 20 % de la population bruxelloise percevait une allocation d’aide sociale en janvier 2017…
Vingt mineurs et 86 femmes dormaient dans la rue lors du comptage de 2018
Sur les 612 enfants dénombrés la nuit du 5 novembre 2018, 265 étaient dans une situation de sans-abrisme : vingt dans l’espace public et 245 dans une structure d’accueil d’urgence). Tandis que 256 séjournaient dans une maison d’accueil, quatre dans un logement de transit, quatre étaient hébergés par une communauté religieuse, 72 se trouvaient dans une occupation négociée et onze ont passé la nuit dans un squat.
Ces chiffres mis en exergue par les auteurs de l’étude montrent que la situation n’a que très peu favorablement évolué pour les mineurs sans-abri. En 2016, 24 mineurs dormaient dans la rue lors du comptage effectué à l’époque. L’an passé, ils étaient vingt. Ceci « malgré la volonté affichée par les pouvoirs publics d’éviter que des mineurs aient à passer la nuit dehors, notamment en ouvrant des places à destination des familles dans les centres du Samusocial », notent les auteurs de l’étude.
C’est pourtant la situation des femmes qui inquiète le plus. Elles étaient 84 à avoir dormi dans la rue lors du décompte mené l’an passé. En 2016, elles étaient cinquante (+ 68 %).
Source: Lalibre.be – publié 4/11/2019