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Le vrai ou faux: qui est pauvre en Belgique?
Le parlement de la Fédération Wallonie-Bruxelles planche sur un décret relatif à la lutte contre la pauvreté. Des chiffres différents sont utilisés pour évaluer cette dernière. Alors auquel peut-on se fier ?
n projet de décret relatif à la lutte contre la pauvreté et les inégalités sociales figure au programme des discussions en Commission du parlement de la Fédération Wallonie-Bruxelles ce jeudi. Son but ? Mettre sur pied un cadre normatif et des principes de gouvernance favorisant l’intégration du thème de la réduction des inégalités dans l’ensemble des politiques de la Fédération Wallonie-Bruxelles.
À l’origine de ce décret, il y a une réalité exprimée par un chiffre : celui qui évalue la proportion de Belges concernés par la pauvreté. En 2017, Statbel, l’Office belge de statistique, estimait que 15,9 % de la population de notre pays était considérée comme à risque de pauvreté, soit plus d’une personne sur sept. Pour la même année, Eurostat, l’Office de statistique de l’Union européenne, estimait, pour sa part, que le risque de pauvreté concernait 20,3 % de la population belge, soit une personne sur cinq. Une même année, deux chiffres différents, pour un même sujet. Mais comment expliquer cette divergence d’estimation ?
Assez simplement, à en croire Philippe Defeyt, président de l’Institut pour un développement durable : « De nombreux indicateurs sont utilisés pour évaluer le taux de pauvreté d’une population. Deux d’entre-deux sont fréquemment utilisés : le taux de pauvreté monétaire et le taux de pauvreté ou d’exclusion sociale. Ces deux indicateurs se basent sur des critères différents, ce qui explique qu’on observe une différence dans les chiffres ».
Le taux de pauvreté monétaire est calculé par rapport au revenu total disponible d’un ménage. On considère ainsi qu’un ménage est touché par la pauvreté si son revenu est inférieur à 1.139 euros nets par mois pour une personne isolée, à 1.800 euros nets pour un couple et à 2.400 euros nets pour une famille composée de deux parents et deux enfants. « C’est le taux le plus souvent utilisé, y compris en Belgique. C’est celui qui estime qu’un peu plus d’une personne sur sept est concernée par la pauvreté en Belgique », précise Philippe Defeyt.
Le second indicateur, appelé taux de pauvreté ou d’exclusion sociale, est, quant à lui, utilisé au niveau européen pour suivre l’évolution de la pauvreté dans le cadre de la stratégie « Europe 2020 » (NDLR : un programme de l’Union européenne en faveur de la croissance et de l’emploi pour la décennie en cours). « Sont considérées comme à risque de pauvreté ou d’exclusion sociale, les personnes confrontées à au moins une des situations suivantes : être en situation de pauvreté monétaire, vivre dans un ménage à très faible intensité de travail et/ou souffrir de privation matérielle grave », développe le président de l’Institut pour un développement durable, « Ce taux s’élève à 20,3 % en Belgique ».
Fiabilité
Alors lequel de ces indicateurs est le plus fiable ? « Les deux le sont à leur niveau. L’indicateur utilisé au niveau européen prend cependant plus de facteurs en compte », estime Philippe Defeyt. Cet indicateur est, en fait, plus complet par le fait qu’il tient compte d’autres dimensions de la pauvreté comme la privation matérielle qui désigne l’incapacité de se procurer certains biens/services considérés par la plupart des individus comme souhaitables, voire nécessaires, pour avoir un niveau de vie acceptable. Elle mesure la part de la population incapable de couvrir les dépenses liées à au moins trois des neuf éléments suivants : le paiement du loyer, d’un emprunt hypothécaire ou des factures d’eau/gaz/électricité, un chauffage adapté au logement, des dépenses imprévues, la consommation régulière de viande ou d’une autre source de protéines, des vacances, un téléviseur couleur, un réfrigérateur, une voiture, un téléphone.
Si Philippe Defeyt reconnaît la légitimité de ces deux indicateurs, il considère cependant, lui, que la pauvreté d’une population devrait être mesurée par rapport au budget minimal permettant à un ménage de vivre « une vie digne ». « Cela permettrait de coller davantage à la situation de chaque famille puisque cela nécessite de calculer ses besoins. Cet indicateur ne devrait pas changer radicalement le pourcentage de pauvres dans notre pays, mais ce ne serait pas nécessairement les mêmes ménages qui seraient pauvres », estime Philippe Defeyt. En Belgique, ce sont les personnes seules ou les parents seuls, locataires dans le secteur privé qui seraient les plus à risque concernant la pauvreté au sein de notre société.
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