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Bruxelles: La crainte d’un Samusocial bis surdimensionné
Le secteur associatif redoute la création d’une nouvelle mégastructure régionale intégrant le Samusocial.
La volonté de la Région bruxelloise de réformer complètement le secteur de l’aide aux sans-abri est antérieure au scandale du Samusocial. Cependant, le projet d’ordonnance a été modifié en raison des récents événements. Validé en seconde lecture au gouvernement, le texte actuellement sur la table tient compte de la nécessité de transformer le Samusocial en un outil régional public. Pour rappel, c’est notamment le statut privé de cette ASBL qui a permis à ses dirigeants de préserver une grande opacité sur la gestion et les rémunérations.
Le collège réuni de la Cocom a donc décidé de mettre sur pied une ASBL de droit public chargée d’accomplir la fonction d’opérateur coordinateur des dispositifs d’aide d’urgence et d’insertion. Dénommée provisoirement Bureau d’aide et d’insertion sociale (BAIS), cette nouvelle structure fusionnera la Strada (Centre d’appui au secteur bruxellois de l’aide aux sans-abri) et l’ancien Samusocial. Outre les missions opérationnelles et le service d’étude, le BAIS sera chargé d’orienter les personnes sans-abri vers les différents centres et de collecter leurs données personnelles pour créer un dossier social.
Rassemblées lundi à proximité du Parlement bruxellois, des associations de terrain actives dans le domaine de l’accompagnement des sans-abri ont fait part de leurs craintes concernant la création de cette mégastructure dont la position sera dominante.
« Le fait que le bureau d’orientation qui est censé être au-dessus de la mêlée intègre un opérateur dont la taille et les moyens sont aussi importants pose question au secteur. Pourquoi unir absolument un opérateur de terrain à un organe censé disposer d’un regard plus global et surtout impartial ? Nous entendons la volonté du collège réuni de faire du Samusocial un outil régional. Mais le successeur du Samusocial pourrait devenir un acteur parmi d’autres plutôt qu’un acteur à part », résume Yahyâ Hachem Samii, le directeur de la Strada.
Mais ce qui inquiète encore davantage le milieu associatif, c’est que la part des moyens accordés à l’aide d’urgence reste trop importante au regard des moyens structurels mis en place. « Il y a des avancées dans le texte puisque certains projets qui apportent des réponses comme Housing First et l’accueil de jour sont reconnus et pérennisés. Mais cela reste très peu par rapport à la place que l’urgence continue d’occuper. Par exemple, la prévention est complètement absente du projet d’ordonnance. Or la meilleure manière de lutter contre le sans-abrisme est d’éviter que les gens basculent dans la grande pauvreté », explique Yahyâ Hachem Samii.
La commission d’enquête parlementaire consacrée au Samusocial qui se concentre principalement sur les questions de gouvernance n’abordera pas l’organisation politique de la lutte contre le sans-abrisme. Les associations réclament dès lors la mise sur pied d’une assemblée décisionnelle permettant une véritable concertation avec le secteur. « Pourquoi prendre en urgence une série de décisions qui n’ont pas été discutées auparavant comme l’intégration du Samusocial dans le BAIS ? », interroge le directeur de la Strada.
Dans l’opposition à la Région, les écologistes émettent des craintes similaires à celle de l’associatif. « C’est le Samusocial qui renaît de ses cendres, en étant plus au centre que jamais. Avec le scandale, une fenêtre était ouverte pour discuter de l’avenir du secteur mais le gouvernement tente déjà de la refermer », déplore le député Alain Maron (Ecolo).
« Une lutte plus efficace »
« Le BAIS ne reproduira pas le même déséquilibre du passé car l’ensemble du secteur associatif bruxellois siégera au sein de ses instances décisionnelles. Le secteur craint l’émergence d’une grande agence régionale qui écraserait les intérêts des acteurs associatifs. Mais grâce à la nouvelle ordonnance et la liquidation du Samusocial, la gestion du sans-abrisme sera entièrement confiée aux acteurs de terrain ainsi qu’aux CPAS. Bruxelles ne pourra pas faire l’économie d’une politique coordonnée et intégrée. Ceci afin de lutter efficacement contre le sans-abrisme. C’est pourquoi il est absolument nécessaire que tous les acteurs pertinents collaborent au sein de la même structure », souligne la ministre bruxelloise de l’Aide aux Personnes Céline Fremault (CDH).