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Combien Bruxelles compte-t-elle de sans-abri ? Un dénombrement a eu lieu cette nuit
Combien Bruxelles compte-t-elle de personnes sans-abri et mal logées ? Pour le savoir, Bruss’Help, l’organisme qui coordonne les dispositifs d’aide et d’insertion, a organisé ce lundi entre 23 heures et minuit, un dénombrement. L’idée, c’est de faire une photographie de la situation à un moment précis. On compile donc les données recueillies dans les différentes structures : maisons d’accueil, centres d’hébergement d’urgence, squats, etc. Et on y ajoute un comptage nocturne des personnes qui dorment dans la rue. 200 professionnels du secteur ont participé à l’opération.
Compter les personnes qui dorment en rue
Il sonne 23 heures, à deux pas de la gare du midi. C’est une nuit d’automne qui flirte avec les 10 degrés. Curieusement douce et silencieuse. Déborah Oddie, directrice de la maison d’accueil l’Escale et Daan Vinck, responsable du centre de jour « Hobo » étudient la carte de la zone qu’ils doivent sillonner : « De préférence, ça se fait à pied », explique Deborah, « pour pouvoir repérer les personnes dans les coins les plus cachés, aller sur les petites places, regarder derrière les buissons ». L’objectif, c’est de compter, « surtout pas de les déranger. D’ailleurs, on n’a rien à offrir ce soir. On est ici pour enrichir des données », rappelle Daan.
Dans le tableau à remplir, il faut pourtant être aussi précis que possible, détailler si c’est un homme, une femme, des enfants. Une fourchette d’âge ? « Evidemment, ce n’est pas évident, surtout si les personnes sont roulées sous les couvertures ». On traverse le quartier, de long en large, scrute les abords d’une église, d’un chantier, l’entrée d’un immeuble. Mais les rues sont quasiment désertes. Seuls quelques chats errent au milieu des poubelles. De vieux cartons gorgés d’eau traînent sur une petite place. « Ces traces, il faut les noter ? » s’interroge Déborah… « Non, elles datent déjà apparemment ».
La fenêtre du dénombrement se déroule entre 23 heures et minuit. Dans la dernière boucle, les compteurs aperçoivent un homme en train d’installer son lit de cartons sur le rebord d’un magasin de meubles. Il disparaît tout entier sous une couverture. Déborah et Daan remplissent la fiche, le lieu exact du dortoir de fortune, les signes distinctifs. « Pour éviter qu’on ne compte pas la personne deux fois, si d’autres l’ont croisé une demi-heure avant, dans une autre zone ». Ce sera la seule personne sans-abri que nous ayons croisée dans la zone délimitée.
L’impact du confinement et de la crise ?
Toute la région bruxelloise ou presque est couverte par ce comptage. Le territoire a été découpé en 70 zones, parcourues par 200 bénévoles. Une pré-enquête a permis de déterminer les traditionnels lieux de refuge, pour s’assurer de ne pas passer à côté. Ce dénombrement est particulier, de par la crise sanitaire que nous vivons, le confinement décidé, le couvre-feu décrété. « C’est vrai que la crise sanitaire a modifié en profondeur la façon dont les gens sans-abri et mal logés vivent », détaille Nicolas, chargé du dénombrement pour Bruss’Help. « Certaines personnes ont pu être hébergées pendant la crise, c’était largement insuffisant évidemment. Mais surtout les gens sont peut-être plus cachés étant donné le couvre-feu. Donc il est possible que cette année, on compte moins en rue ».
L’opération ne se limite pas à la rue. Bruss’Help va aussi compiler les données recueillies dans les différentes structures bruxelloises. « On a une définition assez large de ce qu’est le sans-abri. On se base sur une typologie européenne qui comprend l’ensemble des sans-abri et mal-logés : les personnes qui sont en logement inadéquat, en squat, en structure d’hébergement non agréée, dans les communautés religieuses et aussi tous les gens qui trouvent refuge dans les maisons d’accueil ou qui sont hébergées en centre d’hébergement d’urgence. Cette partie, ce sont des données transmises par nos partenaires ».
Compter aussi selon la même méthode à Liège et Namur
Lors du dénombrement précédent, plus de 4000 personnes sans-abri et mal logées ont été dénombrées à Bruxelles. Dont plus de 700 en rue. Au fil des années, à Bruxelles, le phénomène prend de l’ampleur. Le rapport qui sera rédigé, grâce à des entretiens réalisés dans les centres de jour en amont et en aval du comptage, veut aller plus loin que le dénombrement, mais avancer aussi des hypothèses sur les facteurs qui mènent au sans-abrisme : « Mais on sait qu’ils sont divers : la gestion politique des flux migratoires, la précarisation des classes populaires, l’accroissement des inégalités économiques. Le sans-abrisme et le mal logement, ce n’est que la face émergée de l’iceberg ».
Pour la première fois, ce dénombrement est aussi effectué à Liège, Leuven, Namur et Gand sur le modèle bruxellois, explique encore Bruss’Help. C’est la Fondation Roi Baudouin qui communiquera ces résultats à la fin du mois de février.
Source : RTBF